Veille mécénat culturel (27 mars 2011)

Ces prochaines semaines, je poursuivrai les billets sur les évolutions du mécénat en France, mais je souhaitais commencer la veille sur le mécénat culturel dès cette semaine. 

Le fait de la semaine: le mécénat culturel en question?

Cette semaine donc, on peut relever un article du Monde qui semble découvrir les résultats de l'enquête 2010 de l'Admical sur le mécénat d'entreprise (une étude parue en octobre 2010). Il est vrai que certains résultats sont frappants, notamment en ce qui concerne la part allouée par les entreprises à la culture.


"La  culture ne représente plus que 19 % du budget global et se situe désormais en troisième position derrière le trio "social, éducation, santé" (36 % du budget, soit 720 millions d'euros) et le sport, lequel, en progressant de 26 %, prend la seconde place en terme d'engagement." Les chiffres sont certes inquiétants dans la mesure où l'enquête indique une mutation dans les pratiques de mécénat d'entreprise, et semblent placer à présent la culture en dernière ligne (19% du budget en 2010 contre 39 % en 2008). 


Le président de l'Admical, Olivier Tcherniak, cité dans l'article, affirme pour sa part que "le mécénat culturel est en train de mourir, ou du moins, se transformer radicalement". Le mécénat semble dériver ainsi vers la communication, qui profite bien entendu aux grandes structures culturelles: "Plutôt que de financer quinze petites structures, on préfère investir dans un grand projet plus visible", ajoute O. Tcherniak. La prise de conscience de la RSE (Responsabilité Sociale de l'Entreprise) a eu pour conséquence de favoriser les actions à vocation sociale dans la culture, favorisant ainsi "la culture comme facteur d'équilibre de la société" plutôt que la création. Et ce sont les structures les plus fragiles qui en pâtissent, notamment dans le spectacle vivant. Par ailleurs, la concurrence se fait rude: les banques et compagnies d'assurance ont beaucoup fusionné ces dernières années, "réduisant d'autant les guichets, alors même que la recherche et l'enseignement supérieur partaient à leur tour en croisade".


Passons sur ce terme de "croisade" pour le moins surprenant. On peut tout de même constater, à partir de cet article du Monde, que le mécénat culturel se situe sans doute à un tournant, et que les acteurs culturels devront sans doute redéfinir leur manière d'envisager les projets, comme le note Marie-Sophie Calot de Lardemelle, chargée de projets culturels à la Fondation Orange: "on demande aux artistes une implication dans l'entreprise qui dépasse la contrepartie du logo et des places de concert. Nous ne sommes plus de simples bailleurs de fonds." 

Le commentaire d'Atopiak
Ainsi, deux tendances se dégagent dans cette évolution du mécénat culturel: l'une, plus inquiétante, qui semble aller dans le sens des réalités du mécénat outre-manche, et notamment du Québec, où le mécénat culturel n'apparaît pas comme prioritaire pour les entreprises : dans la région de Montréal, la culture arrive au quatrième rang des secteurs soutenus (elle représente ainsi 35 %) derrière la santé, l'exclusion sociale et l'éducation. D'autre part, la volonté de désengagement de l'état, concomitante à la volonté de développer le mécénat culturel, semble se confirmer. 


L'autre, qu'on peut percevoir de manière plus positive, est la nécessité d'inventer d'autres formes de collaboration et d'échanges entre les entreprises, les structures culturelles et les artistes, afin que les mécènes ne soient pas de simples bailleurs de fonds. Ces échanges restent cependant encore largement à inventer...Et ne pourront sans doute se faire harmonieusement dans un contexte d'urgence budgétaire. 


Dans la lignée de l'article du Monde, on trouve aussi un article sur Youphil, "Le mécénat dit adieu à la culture", qui relaie les mêmes informations. 


Les autres nouvelles mécénat de la semaine


Adoptez un arbre

On dirait que l'initiative du Louvre - faire appel à la générosité par un appel aux dons particuliers pour acquérir Les Trois Grâces de Lucas Cranach - a fait des émules. Cette semaine, le château de Versailles propose aux particuliers d'adopter des tilleuls: suite à la tempête de 1999, le site a en effet été fortement dégradé. L'appel à la générosité des individus se démocratise: on peut aussi adopter un livre à la Bibliothèque Nationale de France (en permettant sa numérisation sur Gallica) ou parrainer un banc au Jardin des Plantes du Museum d'Histoire Naturelle. 


Les subventions, un cadeau sous conditions? Le cas de France Nature Environnement


Cela sort un peu de la question du mécénat culturel, mais cela pose de bonnes questions: suite à l'affichage d'une campagne-choc sur la prolifération des algues vertes en Bretagne, conséquence de l'élevage intensif, la ministre de l'écologie a demandé à ses services d'étudier une éventuelle suspension des subventions à FNE (France Nature Environnement), association à l'origine de cette campagne de communication. En effet, la campagne est jugée "trop agressive"... Arnaud Gossement, avocat et maître de Conférences à l'IEP de Paris, y consacre une tribune libre sur le site Ouvertures. Rappelant qu'une subvention "n'est ni un cadeau ni une sanction", il estime aussi qu'il faut absolument séparer le financement de FNE et ladite campagne. A la fin de son article, il en profite pour rediscuter la question du financement des associations, en montrant avantages et limites du financement public, par les particuliers ou les entreprises.


Le bureau de Marie Antoinette




Le bureau de Marie-Antoinette est de retour à Versailles: l'état a pu l'acquérir pour un montant de 6, 75 millions d'euros grâce au mécénat du groupe LVMH Moët Henessy- Louis Vuitton et Sanofi Aventis. En 1996, Versailles n'avait pu l'acquérir par manque de moyens. Ce bureau est classé "oeuvre d'intérêt patrimonial majeur": comme pour les oeuvres classées "trésor national", la réduction de l'impôt sur les sociétés concédée aux entreprises est alors égale à 90 % du montant du versement...Ce dispositif vise à éviter le départ à l'étranger d'oeuvres patrimoniales jugées majeures.


Pétrole contre oeuvres d'art 
Un exemple de mécénat culturel aux intérêts cette fois-ci plus qu'évidents et qui, étrangement, est davantage relayé sur les médias africains francophones: "Pétrole contre oeuvre d'art", ou comment la Fondation Total soigne l'image de son entreprise...et en profite pour solidifier ses partenariats économiques au Proche-Orient et en Afrique. Après "Route d'Arabie" au Musée du Louvre et "Présence africaine" au Quai Branly, la Fondation Total soutient l'exposition "Angola, figures de pouvoir" au Musée Dapper. (On peut préciser que c'est le Musée Dapper qui est entré en contact avec la Fondation Total, et non l'inverse).

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1 commentaires:

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