Mécénat et financement de la culture (2)

Faisons, pour poursuivre la série d'articles sur le mécénat, un petit historique rapide des évolutions de la loi et les changements observables, destinés à favoriser le recours au financement privé ces dernières années :


- La loi du 1er août 2003 : celle-ci veut clairement favoriser le développement du mécénat dans le financement des organismes culturels, mais aussi dans tout le secteur non-lucratif. Cette loi est très incitative: 60 % du don est ainsi déductible pour les entreprises (et 66 % pour les particuliers).
On peut cependant rappeler que, contrairement aux idées reçues, la fiscalité avantageuse est rarement ce qui pousse les entreprises à faire un don. 


- Parallèlement, l’état a cherché à favoriser le développement des fondations reconnues d’utilité publique, en rendant plus simple leur création. Il s’agit là de s’inspirer du modèle anglo-saxon (à titre comparatif, rappelons qu’on dénombre environ 16 000 fondations au Québec, 56 000 aux Etats-Unis, contre 2443 fondations en France, tout type confondu. Ce chiffre s’explique en partie par la place importante de la structure associative en France, et une tradition philanthropique bien différente…Cependant, en dix ans, le nombre de fondations françaises a doublé).


- Une mission mécénat a été créée au Ministère de la Culture et de la communication, avec un site dédié.


- Parallèlement, des « correspondants mécénat » ont été désignés peu à peu dans chaque région. Cette présence se fait à la fois dans les réseaux culturels (chaque DRAC disposant d’un correspondant) et dans le secteur économique (signature de conventions avec les Chambres de commerce, et les ordres d’experts-comptables, le Conseil supérieur du Notariat).


- La loi du 4 août 2008, dite de « modernisation de l’économie » a permis la création de fonds de dotation, sur le modèle des endowment fund américains. Ces fonds, sorte de mélange entre association reconnue d’utilité publique et fondation, offrent un cadre très souple, sont plus simple à créer qu’une association, présentent une fiscalité très attractive et ne nécessitent pas de mise de départ.
Ce dispositif a connu un succès certain puisque, dans les six mois suivant la parution de ce décret, plus de quarante fonds de dotation dans des domaines divers (culture, recherche, religion, humanitaire, etc.) ont été créés. On trouvera ici une explication du dispositif.

Ces fonds de dotation ont déjà été adoptés par certaines universités, comme Paris VII, ou encore Toulouse 1. Le CNRS a, pour sa part, créé son fonds de dotation en 2009. 
Rappelons à ce sujet que, depuis la loi relative aux libertés et aux responsabilités des universités (la fameuse LRU, très controversée) les universités, autonomes, sont fortement incités à développer et à diversifier leur financement, en ayant recours à la levée de fonds (d’où l’intérêt des fondations, pouvant prendre des formes juridiques différentes).
Cependant, il convient d’en souligner les possibles limites : les sommes disponibles proviennent uniquement de la capitalisation de la dotation (et sont donc dépendants des fluctuations du marché, avec les conséquences que l’on connaît en cas de crise financière…)
Vous trouverez ici quelques problèmes engendrés à l’Université de Harvard et dans les Université québécoises par la récente crise.

Il est intéressant de noter que, suite à ces mesures, la France dispose dès lors d’un des régimes juridiques et fiscaux les plus incitatifs en Europe. Il faut aussi souligner que le fonds de dotation ne permet pas, sauf dérogation, de recevoir des subventions publiques…

Et dans la culture ?

On trouvera sur ce blog quelques problématiques (avantages et inconvénients) du recours à ce dispositif en matière de politiques culturelles).
Le Louvre est le premier musée français a s’être doté de cette structure juridique en 2009, avec un capital de 120 millions €, notamment pour pouvoir placer les sommes issues du projet controversé du Louvre à Abu Dhabi.
Selon une étude parue sur le sujet en septembre 2010,  27 % des fonds de dotation créés le sont dans le domaine art, culture, ou patrimoine. 
Cette étude met aussi en évidence le fait que 77 % de ces fonds sont « consomptibles », ce qui signifie que leur capital peut être consommé entièrement pour le financement de projets. Ceci pose la question de la pérennité de ces dispositifs qui apparaissent pour l’instant davantage comme des véhicules pour la levée de fonds que comme des stratégies de gestion et de financement à long terme….
Hormis le Louvre, d’autres structures, lieux ou manifestations culturelles ont créé leur fonds de dotation, comme le CentQuatre à Paris en juin 2009, le festival La Folle Journée de Nantes et La Chartreuse de Villeneuve Lez Avignon en janvier 2011.


Images: 
- Les Trois Grâces, de Lucas Cranach, un tableau acquis par le Louvre grâce à un appel aux dons de particuliers.
- La pyramide du Louvre

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1 commentaires:

  1. Anonyme says

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